A chaque mal ses mots.
Les mots hurlés, brisés contre nos murs.
Qu'on nous jette au visage, les mots cailloux.
Qu'on nous répète. En boucle. Inlassablement. Vidés. Désossés de leur sens.
Mâchés parfois, désarticulés souvent. Tordus.
Les mots perdus du dément. Les mots inachevés de l'enfant. Les mots brouillés de la panique.
Mélangés emmêlés, bizarres.
Hachés, sous le masque à oxygène.
Ceux de leur histoire, récités pour la troisième fois, ceux de leur douleur. Les mots tus de leurs peurs.
Fuyants en flots, passant de l'un à l'autre, raccrochant tant bien que mal les pensées qui défilent trop vite trop fort. Sans savoir s'arrêter. Symptômes.
L'absence. Le vide. Le froid du silence. Mutisme.
Des appels, des refus, des non, des au secours, des bouteilles à la mer, des questions, nos réponses.
Nos mots qui leur échappent qui passent et qu'ils oublient.
Nos annonces terribles et nos plans de bataille.
Notre jargon bouclier.
Ceux qui nous font rire,
Les lapsus qui s'échappent, miroirs et bévues. Béquilles.
Le graal diagnostic, tant pis si on le craint.
On aura beau chercher... innombrables, incalculables, inclassables...
Tous les mots des urgences...