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Projet crevette: mois de juin. Contraste.

Il y a le départ, je te coupe dans ta phrase alors que tu me parles de ta cheville douloureuse depuis une semaine sans que les antalgiques fassent effet. "désolée monsieur, je dois partir en intervention, mon collègue prend la suite" Et sors de ton box.

Les questions: "c'est quoi? Quel âge? On va où?"... "Ah. OK".

Les réponses.

Et mon pouls qui s'accélère.

Trajet concentré et en silence, on anticipe avec l'infirmier, pour garder le contrôle. Pour ne pas perdre de temps. Pour maintenir un ordre quand on sera sur place. Le calme. Surtout le calme. Et la peur et le doute. Est-ce que je saurai faire? Qu'est ce que je vais leur dire?

Arrivée sur place, souvent en silence, chacun dans sa tâche, chacun son sac et son matériel. Ambiance. Pompiers. Secouristes. Le son d'un DSA. Se présenter brièvement, et foncer, faire ce qu'on attend de nous. Faire du mieux qu'on peut mais ne rien pouvoir y faire. Ne rien pouvoir y faire putain. Et merde, de merde de merde. Attendre encore un peu pour annoncer que c'est grave. Pour laisser juste un peu de répit, encore un peu de répit, un peu de souffle. Pour eux. Pour moi. Dire qu'on fait tout ce qu'il y a à faire.

Mais que ça ne marche pas.

Regarder un monde qui s'effondre, s'efforcer de ne pas pleurer. S'efforcer de ne pas être en colère. Et encore ne rien pouvoir y faire. Ne rien de putain de pouvoir y faire.

Le rendre présentable, le poser dans son lit. Ranger le matériel. Ne plus savoir quoi faire pour soulager la douleur. Proposer un cachet, adresser à un psy.

Partir.

Rentrer dans les urgences.

Et je te retrouve toi et ta cheville douloureuse depuis une semaine. Je m'efforce de ne pas être en colère. Je ne sais pas quoi faire. "On va faire une radio peut être une prise de sang".Ca m'est un peu égal là tout de suite... Je sors de ton box et retrouve le rhume de l'enfant fiévreux, et l'alcoolique vomissant agité dans son box.

Je regarde notre petit monde qui continue de vivre. Inconscient. J'entends vos blagues, et les rires. Sent l'odeur du café. Et un peu de traviole, je rentre dans la danse...

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